Suite de l’interview de Gaëlle Fleury, cette praticienne de l’écologie intérieure dont le parcours de vie m’a tellement inspirée que je tenais à tout prix à le partager avec vous.
Le premier épisode est ici, Gaëlle y parlait de la perte profonde de sens qu’elle a vécue dans sa vie, et de la déprime qui s’en est suivie. Passer à l’action, changer son regard, s’orienter solutions, est ce qui lui a permis de rebondir. Voici la suite de son histoire, j’espère que vous trouverez dans ce parcours autant d’inspiration que moi.
La légende du colibri
Gaëlle Fleury : Passer à l’action en allant rencontrer des personnes qui partagent cette valeur écologie et qui ont déjà aligné leur mode de vie à cette valeur, cela a été comme une bouffée d’air frais. Comme si je découvrais le monde pour la première fois. J’avais des étoiles dans les yeux et j’étais remplie d’espoir. J’ai appris à jardiner, à reconnaître les plantes médicinales, à réaliser des habitations en écoconstruction. Nous avons même fait une saison chevrière : mon compagnon emmenait les chèvres pâturer et faisait la traite, et moi je fabriquais le fromage et la vente sur les marchés. Ma fille nous accompagnait dans toutes nos tâches et je suis heureuse qu’elle ait pu s’imprégner de cette ambiance (nature abondante, vie en collectivité, contact avec les animaux, jardinage les pieds et les mains dans la terre…). Nous avons rencontré des gens généreux, solaires, intelligents et charismatiques. Retrouver les besoins essentiels et donner du sens à mes actions m’a redonné goût à la vie. Cette vie en collectivité reste pour moi un souvenir magique.
J’ai intégré que je pouvais agir à mon échelle, faire ma part, comme dans l’histoire du colibri de Pierre Rabhi.
L’histoire se passe dans la forêt. Les animaux sont paisibles et chacun vaque à ces occupations. Un orage arrive, et la foudre s’abat sur un arbre, il prend feu et le feu se propage. Tous les animaux, pris de panique, se réfugient au bord de la rivière et regardent impuissants le désastre. Seul le colibri semble en mouvement. Il va à la rivière, prend de l’eau dans son bec et retourne à la forêt jeter les gouttes d’eau sur les flammes.
Au bout d’un moment le jaguar lui dit : « Colibri, tu n’es pas fou ? Tu crois que c’est avec ces quelques gouttes d’eau que tu vas éteindre l’incendie ? »
Le colibri répond : « Je sais bien que je n’y arriverai pas seul, mais je fais ma part. »
C’est alors que Toucan dit : « Moi j’ai un grand bec et je peux voler », et il commence à faire des allers-retours lui aussi. Les autres animaux décident de les soutenir et de passer aussi à l’action. L’histoire ne dit pas s’ils ont réussi à éteindre l’incendie mais une chose est sûre, c’est que depuis ce jour les animaux sont unis par une force nouvelle.
Mots & Merveilles – La Fabrique : Quelle est ton interprétation de cette légende ?
Gaëlle Fleury : La légende du colibri nous enseigne à ne pas avoir peur d’être différent des autres, écouter son intuition, et agir selon son cœur en dépassant ses peurs. C’est passant à l’action que des personnes très différentes peuvent se rallier à la même cause. Ce n’est pas le résultat qui compte, mais le chemin parcouru. À plusieurs nous sommes plus forts. Chacun est responsable de ses actions. Si tout le monde fait sa part, agit dans sa zone d’influence, alors nous avons un impact plus important.
En ce qui concerne mon propre cheminement, les gens qui avaient au début critiqué ma démarche ou eu peur, ont fini par s’y intéresser. J’ai vu ma belle-famille mettre en place des changements tels que modifier leur alimentation, ne plus utiliser de micro-onde, faire un compost… J’ai commencé à publier nos aventures sur les réseaux sociaux et beaucoup de personnes ont commencé à nous suivre. Nos amis nous félicitaient et nous trouvaient courageux…. En somme, nous sommes passés d’écolo-relou à famille courageuse, dans le regard des autres.
Faire sa part et être heureux, une démarche qui commence en soi
Mots & Merveilles – La Fabrique : Comment as-tu commencé, concrètement, à « faire ta part » ?
Gaëlle Fleury : Pour moi, c’est passé – et cela passe encore – par la mise en place d’une démarche intérieure. Je me visualise avec plusieurs cercles autour de moi, de plus en plus grands. J’ai d’abord commencé à agir dans le premier cercle : manger local, trier les déchets, faire un compost, fabriquer mes produits ménagers, avoir un jardin… Tout cela est très positif. Cependant, c’est la vie en collectivité qui m’a fait mettre le doigt sur une notion centrale qui m’avait échappé de prime abord : il existe un cercle encore plus proche, et c’est celui de notre état interne. Or si je veux agir dans les cercles plus grands, il me faut d’abord travailler sur mon écologie intérieure, à savoir la gestion de mes émotions, la connaissances de mes valeurs et de mes stratégies pour les honorer, mais aussi prendre soin de mon corps en faisant du sport et en mangeant sainement. C’est seulement une fois cette stabilité interne acquise que j’ai pu aller dans les cercles suivants.
Et j’ai été surprise et ravie de constater que pas à pas, finalement, ma zone d’influence n’était pas aussi maigre que je ne l’imaginais, loin de là ! J’ai alors réalisé que l’écologie intérieure faisait partie de cette sphère qu’on appelle « bien-être ». Que de plus en plus de chercheur se spécialisaient sur le bonheur.
Mots & Merveilles – La Fabrique : Le bonheur, justement, parlons-en. On passe notre vie entière à courir après, mais il est très difficile à trouver, à reconnaître, et encore plus à conserver. Pour toi, le bonheur, qu’est-ce que c’est ? Peut-on vraiment y accéder, et comment ?
Gaëlle Fleury : Le bonheur c’est ta situation actuelle telle qu’elle est, simplement avec un nouveau regard. Et oui, bien sûr on peut y arriver ! Je vais me répéter mais pour être heureux il faut que nos actes soient en accord avec nos valeurs. Peut-être que le premier pas est de prendre un temps de réflexion d’introspection pour trouver ses valeurs… et mettre de la conscience sur nos actions en se demandant : « Quand je fais ça, est-ce que je respecte mes valeurs ? » Si la réponse est non, alors il faut abandonner cette action, changer nos habitudes, trouver de nouvelles stratégies plus satisfaisantes. C’est un entrainement, cela ne vient pas seul. Il faut de la volonté, de la détermination et du soutien (famille, amis, coach).
L’autonomie est très importante aussi. Je parle d’une autonomie émotionnelle. Savoir gérer ses émotions et avoir la conscience de ses besoins est une force inestimable qui apporte estime de soi, et confiance en soi. Avec une bonne estime de nous-même nous nous autorisons à faire des choses audacieuses. Voici les deux premières clefs du bonheur à mes yeux. Que nos actions soient en accord avec nos valeurs et avoir une bonne estime de nous-même pour réaliser nos rêves.
Être en accord avec ses valeurs, la clé du bonheur
Mots & Merveilles – La Fabrique : Peux-tu nous donner quelques exemples de ces principes dans la vie quotidienne?
Gaëlle Fleury : À l’époque je fumais, et un jour je me suis dit : comment prétendre vouloir sauver la planète si je me détruis moi-même ? Pourquoi donc j’aimerais que les gens soient plus respectueux, alors que je m’autorise à juger, à critiquer les autres ? Et puis au travail, en famille ou entre amis, il faut bien dire que je me suis souvent sentie frustrée. Je n’avais jamais la qualité d’écoute, d’attention, de reconnaissance que j’espérais. Alors je me disais que ce n’était pas de vrai amis, ou que mes collègues c’étaient des cons, et que ma famille, « ils ne comprennent jamais rien ». Seulement cela ne m’a pas rendu plus heureuse pour autant. Ce n’est que lorsque j’ai commencé à prendre soin de moi, à avoir conscience de mes besoins, à diversifier les stratégies pour y répondre, que je me suis sentie en paix dans mes relations. Mes attentes n’étaient pas les mêmes, et surprise ! Lorsque je rayonne de ce bien être interne, au travail, en famille et avec mes amis je reçois beaucoup plus que ce que je n’attends d’eux.
Mots & Merveilles – La Fabrique : Est-ce à dire que le bonheur vient d’abord de soi, puis qu’il est contagieux ?
Gaëlle Fleury : Je pense que lorsqu’on rayonne ce bonheur, les gens autour de nous sont réceptifs, ou sont peut-être plus joyeux. Je pense aussi que cela redonne espoir et que cela motive les autres à eux aussi chercher ce bonheur, à entreprendre des démarches pour améliorer leur qualité de vie. Je ne dirais pas que c’est contagieux car pour moi, une démarche personnelle est vraiment nécessaire. En revanche c’est comme un aimant qui pousse les gens à se dire : « Moi aussi je veux être bien dans ma vie. » Pour conclure, je pense que la vie est cyclique, et que nous passons par différentes phases : l’enfance, période de tous les apprentissages, l’adolescence, époque de l’affirmation de soi et de la confrontation, la vingtaine pendant laquelle on profite de cette liberté, de cette légèreté, de l’insouciance en quelque sorte. Et puis un jour arrive une phase où on veut donner un sens à sa vie, où on devient conscient que le temps sur cette terre est limité. Pour ma part je trouve essentiel d’optimiser ce temps pour arriver au bout être fiers de nous, et pouvoir regarder notre vie comme une belle œuvre d’art. Pour ça il est judicieux de prendre un temps de réflexion sur sa vie, et d’apprendre à être en être maître.
En attendant de vous parler plus précisément de l’écologie intérieure, Gaëlle et moi souhaitions conclure avec cette citation :
Retrouver les autres articles de la série :
Le partenaire de Mots & Merveilles – la Fabrique : Gaëlle Fleury
Gaëlle a grandi en Guadeloupe jusqu’à ses 17 ans et en garde le souvenir merveilleux d’une vie locale et simple. Elle part vivre à Lyon où elle obtient son BAC et travaille dans un restaurant malgré le soutien hésitant de ses proches focalisés sur sa timidité et son manque de confiance en elle. Sa volonté d’indépendance et son désir de se surpasser lui permettent de dépasser sa maladresse et de progresser jusqu’à devenir assistante d’exploitation, gérant un restaurant et une équipe de 8 personnes. Puis une déception amoureuse lui fait quitter la région lyonnaise pour le Pays de Gex, dans l’Ain, où elle rencontre son compagnon, travaille dans le milieu de la nuit, quitte tout pour voyager. Six mois plus tard, elle attend sa première petite fille : une grossesse qui déclenche le changement de mode de vie de la famille.
Aujourd’hui, Gaëlle est coach professionnel : elle accompagne ses clients pour les aider à ses fixer des objectifs ambitieux et atteignables, pour définir qui ils sont maintenant, où ils veulent aller et comment y aller… ce qui est à chaque fois un long et merveilleux voyage. Gaëlle est spécialisée dans la communication non violente de Marshall Rosenberg. « Ce processus puissant est devenu un art de vivre pour moi, et dans mon travail cela m’apporte une grande clarté sur l’accompagnement de mes clients. J’aime le transmettre car c’est un excellent moyen pour avoir une bonne maîtrise de ses émotions. »
Gaëlle est très active sur les réseaux sociaux, où elle partage sa philosophie de vie – avec beaucoup de succès, et où elle soutient les personnes intéressées par cette démarche. Elle travaille actuellement sur un programme en ligne afin d’accompagner des personnes curieuses et désireuses de commencer à vivre leur écologie intérieure. Un site est en cours de préparation. Son ambition ne s’arrête pas là puisqu’elle a également l’intention d’écrire un livre.
« La spécificité de ma démarche est que je suis mon intuition, je suis guidée par mon cœur. Je n’ai pas fait d’étude sur entrepreneuriat. Et j’ai cette confiance profonde : ce que je fais est exactement ce que je dois faire. C’est le bon moment, le bon endroit, je rencontre les bonnes personnes. C’est le thème qui me convient. C’est encore une aventure merveilleuse. »
N’hésitez pas à suivre Gaëlle :
Ressources
Vidéos
- M. Mondialisation : Le travail, pourquoi ? 1/2
- M. Mondialisation : Le travail, pourquoi ? 2/2
- Marc de la Ménardière, Changer de croyances pour changer de monde
- La légende du colibri, racontée par Pierre Rabhi
- En quête de sens, film réalisé par Nathanaël Coste et Marc de la Ménardière
Livres
- Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs), Marshall B. Rosenberg
- Le Prophète, Khalil Gibran
- L’homme qui voulait être heureux, Laurent Gounelle